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Scène aux champs (10'04)


  écouter en binaural (mix)  

Propos : référence à la Scène aux champs de la Symphonie fantastique de Berlioz (et au poème symphonique en général) d'une manière symétrique : plutôt que peindre la nature avec de la musique, faire de la musique avec de la nature peinte ; explorer comment les champs de proximité et de distance sont transformés de leur captation univoque et leur diffusion plurivoque ; développer des traitements d'espace originaux à travers les récentes techniques de décodage ambisonique.
Voir la note en bas de page.

Origine sonore : divers microphones quasi-coïncidents avec traitement ambisonique ont été utilisés entre 2012 (?) et 2022 pour obtenir les enregistrements utilisés (presque tous réalisés en Auvergne-Rhône-Alpes).

Déroulement :
- sélection d'enregistrements "nature"
- réalisation de nouveaux enregistrements
- tests de conversions A>B, d'upscaling et de décodages
- application du principe du double décodage
- montage
Ce résumé semble assez simple, mais c'est l'une des pièces qui m'a demandé le plus de travail et posé le plus de problèmes en raison de la complexité liée à mon utilisation particulière de l'ambisonique.
Note 2024 : une nouvelle version devrait voir le jour cette année, poussant un peu plus loin la "désambisonication" de sons pour une meilleure utilisation des possibilités de l'espace volumétrique.

Compatibilités : cette pièce peut être assez facilement adaptée pour les dômes, mais la "fantômisation" de son petit dôme intérieur lui fait néanmoins perdre une grande partie de son intérêt...

 

Opérations

 
 

Les microphones compacts ayant été utilisés pour produire les phonographies de Scène aux champs : CoreSound Tetramic, Brahma, Sennheiser Ambeo, Zoom H2n, Zylia ZM-1, Voyage Audio Spatial Mic, Twirling 720 Lite, Zoom H3-VR.
Les deux derniers ont été les plus utilisés... car les plus portables (et les premiers en italiques ont été revendus pour acheter les suivants...).

double-dome

L'espace holophonique des Préludes à l'espace et sa correspondance matérielle avec les points haut-parlants de l'Acousmonef peut être considéré comme étant constitué de deux (ou trois) dômes imbriqués. Ceci constitue d'ailleur une assez bonne manière de représenter la disposition du cirque : un dôme extérieur pour le châpiteau, et un dôme intérieur pour la piste. Ne manque ici que le point central...
Dans cette pièce un certain nombre de tournages codés en ambisonique ont été décodés simultanément pour ces deux pseudo-dômes - les ondes diffuses sur le dôme extérieur et les ondes directes/proches sur le dôme intérieur. Ceci a permi de produire d'une manière mathématiquement infidèle mais auditivement plutôt efficace un volume d'espace tridimensionnel, c'est à dire pas seulement l'enveloppe d'un champ de projection mais aussi, on pourrait dire, son épaisseur. Ceci permet de rendre son écoute possible et intéressante pratiquement quelle que soit la place de l'auditeur, en tout cas sans référence au sweet spot habituel.
Le résultat de ce double décodage est parfaitement identifiable sur le sonogramme en haut de page : les deux tiers supérieurs (plus les 2 canaux du bas) concernent le dôme externe ("normal"), et le tiers inférieur le petit dôme, qui n'est pas toujours présent, et dans lequel quelques sons non codés sont visibles (ils ne remplissent pas tous les canaux).
Le même principe est également appliqué avec succès dans d'autres pièces de la série, notamment dans Concret-HP et dans L'étoile-papillon.

  vidéo montrant l'application du double décodage

 

Différentes manières utilisées pour "décoder" les signaux issus de l'encodage ambisonique :
1. décodage linaire après upscaling de l'ordre 1 à 5 grâce au plugin Compass Upmixer,
2. décodage paramétrique des ondes diffuses vers le dôme externe 47 points,
3. décodage paramétrique des ondes directes vers le dôme intérieur 19 points.
J'ai aussi quelques fois utilisé l'enregistrement non encodé (Format-A) de manière à pouvoir placer le son plus précisément, plus localement, comme en 4 : traitement du signal octophonique du Spatial Mic non encodé.
Quelques autres traitements non orthodoxes ont pu être également appliqués de temps en temps...

Un premier travail de composition a été effectué avec des fichiers dont certains étaient en Format-A et qui étaient convertis différemment en Format-B. À partir d'un certain stade j'ai décidé de rendre ces réglages définitifs en générant de nouveaux fichiers, ce qui a beaucoup allégé la lecture de l'ensemble.

 

Projet Reaper finalisé : pratiquement tous les fichiers sont en B-Format, à part ceux des 5 dernière pistes qui sont issus de décodages préalables, ou qui sont spatialisés avec d'autres méthodes.
Les pistes 3 à 12 sont décodées normalement ou avec upscaling (donc sur le dôme extérieur), les pistes 13 à 15 sont consacrées au double décodage tel que présenté précédemment.

On peut voir qu'à part de très rares moments l'espace est toujours composite, et peut consister en une superposition d'images spatiales importante.
À mon goût, le rendu haut-parlant est globalement réussi et quelques-fois même un peu plus que ça, mais j'ai été surpris lorsque j'en ai effectué l'enregistrement binaural que celui-ci soit finalement très confus, alors qu'avec mes autres pièces il procurait généralement une image très aérée et lisible (à défaut bien-sûr d'être juste).
Mais c'est finalement tout à fait normal. Chaque enregistrement qui combine encodage et décodage ambisonique recouvre toujours l'ensemble de l'espace. Sur une phonographie, l'impression est généralement positive, celle assez naturelle de se situer au milieu de la scène acoustique, mais la superposition de plusieurs devient vite envahissante : il y en a trop toujours partout, et ce qui faisait la qualité de chacune de ces acoustiques est mangé par les autres.
En situation haut-parlante avec une résolution spatiale assez élevée, et avec le principe du double-dôme, on évite le compactage et on aboutit au contraire à un relief original, mais le binaural ignore tout cela... Le réencodage de la pièce pour sa diffusion sur un dôme unique donne également la même impression, et il est paradoxal de constater que bien qu'elle soit presque exclusivement constituée d'enregistrements traités en ambisonique, c'est une des pièces qui sonne le plus mal sur un dôme :-(

 

Comme souvent, il a été plus facile d'opérer des resserrements sur le rendu final 67 canaux que sur le projet multipiste.
Sinon, à part la petit bosse d'amplitude vers la fin, une dynamisation n'est ni nécessaire ni appropriée par rapport au type de sons et d'écriture.

Note
Scène aux champs est une pièce doublement ambigüe, qui malgré son apparente simplicité - des images sonores issues de field recording non transformées - n'est pas simple à entendre...
La première ambiguïté est celle qui est inhérente à la reproduction de phonographies, à la question de la pertinence et de la justesse de toute tentative de reproduction de ce que l'on peut appeler "le réel". Il s'agit toujours d'images, même ici d'une imagerie, mais ces images correctement rendues peuvent faire illusion : la distinction qui est généralement aisée dans le domaine visuel (support, cadre de l'image...) est dans le cas de l'image haut-parlante beaucoup plus subtile et ambigüe, et c'est bien-sûr cela qui nous intéresse avant tout !
Mais si cela se passe sans heurt à l'intérieur de l'espace réduit de la stéréophonie, l'ouverture vers un espace tridimensionnel considéré comme plus naturel bouleverse en fait les fragiles rapports qui peuvent exister entre les images d'espace et les espaces produits. Ils fait éclater les conventions du cadre visiophonique et met à jour les paradoxes issus de la captation audio centrique, où l'image de distance se retrouve phusiquement plaquée sur la surface d'un volume. En proposant une solution mathématiquement cohérente mais concrètement complexe, la technique ambisonique amplifie en réalité ces paradoxes et incongruités dès que la place de l'auditeur s'éloigne du point de convergeance où l'image binaurale devrait se reconstruire. Le travail du "double décodage" que j'ai appliqué ici en résout certains et en crée de nouveaux.
Les divergences perception, mémoire et imaginaire que cela produit peut être dérangeante, car elle vient interférer avec des reflexes mentaux longuement acquis au fil de notre évolution biologique, et contrairement à la situation à laquelle nous a conduit l'habituation stéréophonique, elle se trouve ici dévoilée et magnifiée par le développement spatial. En plus, dans le cas de la diffusion sphérique et de la technique ambisonique, celui-ci n'a rien de "naturel", c'est à dire de commun avec la production des sons dans l'espace : on se retrouve avec un type de convention qui est seulement plus large et pour lequel nous sommes, pour l'instant, beaucoup moins formatés, c'est à dire beaucoup plus sensibles.
Mais si l'on accepte l'artificialité de la production haut-parlante et de cette situation d'écoute particulière, ces distorsions de la réalité et ces ambiguïtés peuvent constituer au contraire un terrain de représentation et d'expression extra-ordinaire, qui va encore enrichir la palette de nos compositions. Il peut malgré tout nécessiter un temps d'adaptation avant de trouver de nouveaux réflexes, de nouveaux modes d'interprétation de la perception, de nouvelles manières de se faire son cinéma...

La pièce a reçu la "1ère mention" au concours ISAC 2023 à Pesaro en Italie.